Le calendrier spatial de février 2016 : le golfe de Kutch et le grand Rann de Kutch vus par
le satellite européen Sentinel-2A. Image acquise le 1er février 2016 à 5h51 UTC.
Crédit image : ESA / Commission Européenne / Copernicus
En Inde, le golfe de Kutch et le grand Rann de Kutch vus par le satellite européen Sentinel-2A
L’image que j’ai choisie pour le calendrier de février a été acquise par Sentinel-2 le 1er février 2016, à 5h51 UTC. Vous avez deviné : ce n’est pas une image en couleurs naturelles. J’ai choisi de présenter ici une composition colorée des canaux 8, 4 et 3 représentés respectivement en rouge, vert et bleu.
Le rouge sur l’image correspond donc au canal proche-infrarouge qui met particulièrement bien en évidence la végétation active mais aussi les sédiments et les matières en suspension dans l’eau.
L’image en résolution réduite dont est tiré l’extrait illustrant le calendrier spatial de février 2016. Composition colorée des canaux 8,4 et 3. Image acquise par le satellite Sentinel-2A
le 1er février 2016 à 5h51 UTC. Crédit image : ESA / Commission Européenne / Copernicus
23°N, 70.30°E : nous sommes pratiquement au niveau du tropique du Cancer, à l’ouest de l’inde, dans l’État du Gujarat, à la frontière avec le Pakistan. Cet extrait d’image Sentinel-2 couvre le golfe de Kutch, un bras de la mer d’Arabie, correspondant aussi à l’embouchure du fleuve Rukmavati.
Les eaux sont peu profondes, environ 120 mètres au maximum. L’aquaculture côtière occupe une place importante et on identifie facilement les motifs géométriques des fermes d’élevage de crevettes.
Immédiatement au nord se trouve le Grand Rann de Kutch, une région constituée d’un marais salé saisonnier et de dunes de sables, au sud du désert du Thar (200 000 km2). A l’origine, c’était une zone de hauts fonds de la mer d’Arabie, que les mouvements géologiques ont transformée en lac intermittent.
Lors de la mousson d’été (en gros de juin à septembre), l'eau de pluie envahit le marais, entourant entièrement le reste du district de Kutch qui forme alors une île temporairement séparée du reste de l'Inde. Une fois les eaux évaporées, le Rann de Kutch, redevient un désert blanc, couvert de de sel, dont la blancheur est bien visible sur l’image satellite.
Hébergeant de nombreuses espèces protégées, le Rann de Kutch est classé comme site RAMSAR (convention internationale pour la préservation des zones humides) depuis novembre 2002. C’est un paradis pour les observateurs d’oiseaux migrateurs (flamands, hérons, aigrettes, etc.)
La cinquième conférence Global Bird Watchers y a été organisée (à Porbandar) du 31 janvier 2015 au 2 février 2015.
Deux extraits en pleine résolution de l’image Sentinel-2. En haut, installations d’aquaculture
dans le golfe de Kutch. En bas, le Rann de Kutch. A gauche, représentation en couleurs naturelles (bandes 4,3 et 2). A droite, représentation avec le canal proche-infra-rouge (bandes 8,4 et 3).
Crédit image : ESA / Commission Européenne / Copernicus
Avec du gaz naturel en abondance dans le sous-sol, cette richesse écologique est menacée par le développement d’activités industrielles dans le cadre des ZES (Zones Economiques Spéciales ou Export Processing Zones) : installations pétrolières et chimiques, cimenteries, exploitation du sel, centrales thermiques à charbon, …
Au sud, les pêcheurs du golfe de Kutch se sentent également menacés par cette industrialisation qui se traduit également par une politique d’acquisition des terres. La lutte des populations locales porte sur le maintien de zones d’intérêt public.
La limite nord du Rann de Kutch matérialise la frontière entre l’Inde et le Pakistan. Depuis 1965 et la deuxième guerre du Cachemire, la frontière, en particulier la zone appelée Sir Creek, fait l’objet d’un litige avec des incidents frontaliers entre l’Inde et le Pakistan. Karachi est à seulement 160 km au nord-est. Encore très récemment (mars 2016), l’Inde a relevé son niveau d’alerte dans l’état de Gujarat, après des informations faisant état de passage de groupes de rebelles.
Un œil exercé repérera également sur l’image le port et la plage de Mandvi avec ses éoliennes, la ville fortifiée de Bhuj, malheureusement frappée par un tremblement de Terre meurtrier en janvier 2001 (20000 morts) ou Gandhidham, une ville beaucoup plus récente, créée en 1950.
Les lancements de janvier 2016
Voici le tableau de bord des lancements pour le mois de janvier 2016, un nouvel outil que je réactualiserai chaque mois :
Le tableau de bord des lancements orbitaux pour le mois de janvier 2016 :
nombre de lancements, pays de lancement et type de fusée, nombre de satellites,
types d’orbites et principales missions. Crédit image : Gédéon
La Chine avait procédé au dernier lancement de l’année 2015 avec le satellite Gaofen-4. C’est également un lanceur chinois qui ouvre l’année des lancements en 2016.
Il y a eu 5 lancements orbitaux en janvier, tous dans la deuxième quinzaine : un chinois, un américain, un indien, un européen et un russe. Un seul, Jason-3, un satellite d’altimétrie, à destination de l’orbite LEO et 4 vers l’orbite de transfert géostationnaire (3 satellites de communication et un de navigation), et un total de près de 19 tonnes mis en orbite.
Voici quelques détails sur ces cinq lancements :
- 15 janvier 2016, 16:57 UTC, Xichang (Chine) : une fusée chinoise Chang Zheng 3B/E met en orbite le satellite de télécommunications bélarusse Belintersat 1 (5223 kg au lancement). Le satellite utilise la plate-forme chinoise DFH-4. La charge utile est fabriquée par Thales Alenia Space.
- 17 janvier 2016, 18:42 UTC, Vandenberg AFB : une fusée Falcon 9 v1.1 de Falcon X met en orbite le satellite d’altimétrie Jason 3. C’est la 14ème mise en orbite réussie par cette version de la fusée Falcon 9 sur un total de 15 vols. La tentative de récupération du premier étage sur une barge en mer échoue de peu. L’orbite de Jason-3 est circulaire à une altitude moyenne de 1312 km et inclinée à 66°. Fabriqué par Thales Alenia Space, le satellite Jason-3 a une masse de 553 kg au décollage. Jason-3 est une coopération internationale entre le CNES, la NOAA, la NASA et Eumetsat.
Tentative de récupération du premier étage du lanceur Falcon 9 utilisé pour le lancement
du satellite Jason-3. Presque réussi… Des échecs comme celui-ci annoncent des succès.
Crédit image : SpaceX.
- 20 janvier 2016, 04:01 UTC, Sriharikota (Inde) : la fusée PSLV C-31 décolle et met en orbite le satellite de navigation IRNSS 1E (1425 kg). L’orbite finale est une orbite géosynchrone inclinée à 28°. C’était le 33ème lancement d’un lanceur PSLV, avec 31 vols réussis. Une belle fiabilité.
- 27 janvier 2016, 23:20 UTC, Kourou : la mission VA 228 de la fusée Ariane 5 lance le satellite de communication Intelsat 29e. L’orbite visée est une orbite de transfert géostationnaire (250 x 35546 km). Intelsat 29e est un gros satellite : 6552 kg au décollage, avec 20 transpondeurs en bande C. 249 en bande Ku et 1 en bande KA. Le satellite sera positionné à 310°E.
Décollage de la mission VA 228 de la fusée Ariane 5.
A bord, un beau bébé de 6,5 tonnes : le satellite Intelsat 29e.
Crédit image : ESA / CNES / Arianespace / Optique vidéo du CSG – JM Guillon
- 29 janvier 2016, 22:20 UTC, Baïkonour (site 200, aire de lancement 39) : une fusée Proton M / Briz M (version phase 3) met en orbite le satellite de communication Eutelsat 9B (5175 kg au décollage) construit par Airbus Defence and Space. L’orbite initiale est une orbite GTO (4444 x 35696 km), inclinée à 12,18°. Eutelsat 9B emporte 66 transpondeurs en bande Ku ainsi que la charge utile EDRS (European Data Relay System), un système de transmission laser à haut débit, destiné notamment à récupérer les données transmises par les satellites Sentinel du programme européen Copernicus.
30 ans de SPOT : SPOT 3, le mauvais élève de la famille ?
Je continue le cycle d’articles sur les accidents et les pannes dans l’espace. A l’occasion des 30 ans du lancement du premier satellite SPOT (c’était le 22 février 1986), j’ai choisi d’aborder la panne de SPOT 3.
Tous les satellites SPOT ont eu une durée de vie largement supérieur à la durée de vie nominale : 17 ans pour SPOT 1, 19 ans pour SPOT 2, 15 ans pour SPOT 4 et 13 ans pour SPOT 5...
Tous ? Sauf un : SPOT-3, prévu normalement pour fonctionner au moins trois ans, n’a fonctionné que trois ans et 2 mois… Le service minimum. Lancé le 26 septembre 1993 depuis le Centre Spatial Guyanais (mission Ariane), il a cessé de fonctionné le 14 novembre 1996.
Les dernières images acquises le 14 novembre 1996 par SPOT 3 au-dessus de la Chine.
Copie d’écran d’une consultation du catalogue Geostore d’Airbus DS.
3 mois plus tard, la commission d’enquête publiait son rapport : l’analyse des causes de la panne du satellite SPOT 3. C’est très instructif sur le fonctionnement d’un système de contrôle d’attitude et cela mérite un article à part entière. A partir de maintenant, je vais d’ailleurs séparer le calendrier du mois, qui continuera à répertorier la liste des lancements du mois précédents.
En savoir plus :
- Les autres pages du calendrier spatial du blog Un autre regard sur la Terre.
- Un article plus détaillé sur la panne du satellite SPOT 3.
- Un article sur les systèmes de contrôle d’attitude et d’orbite (SCAO ou AOCS en anglais), avec la présentation du SCAO des satellites Pléiades.
- La série d’articles sur les trente ans du satellite SPOT.
- Sur le blog Un autre regard sur la Terre, la galerie d’images du satellite Sentinel-2A.
- Sur le site RAMSAR, un descriptif du Grand Rann de Kutch.
- Sur le site Incredibleindia.org, un article sur la région Gujarat et le Rann de Kutch.
- Sur le site d’Arianespace, un article sur la mission VA228.