Fusée Soyouz : comment ça marche ?
Deux photographies et une chronologie détaillée : cela suffit pour comprendre comment fonctionne la fusée Soyouz et comment elle met sa charge utile (le satellite Pléiades 1B) en orbite.
Voici les deux photographies choisies pour leur intérêt pédagogique :
En haut, une fusée Soyouz en cours de montage : au premier plan, deux des quatre boosters
autour de l'étage central. A l'arrière blanc, le troisième étage. En bas, le satellite Pléiades 1B
monté sur l’étage Fregat avant mise en place de la seconde demi-coiffe.
Crédit image : ESA – CNES – Arianespace / Optique Vidéo du CSG – P. Baudon.
Ces deux images permettent de bien repérer les quatre étages de la fusée Soyouz.
Sur la photographie du haut :
- Le premier étage correspond en réalité aux 4 blocs d’accélération latéraux (les boosters appelés blocs B, V, G et D).
- Le deuxième étage est le corps central (bloc A) autour duquel sont fixés les 4 boosters.
- Le troisième étage (bloc I).
- l’étage supérieur Fregat sur lequel est fixée la charge utile. Ici, il n'y a qu' un seul satellite : Pléiades 1B. En décembre 2011, il y a en avait 5 plus petits qui accompagnaient Pléiades 1A (SSOT et les quatre satellites Elisa).
Les étages et la coiffe sont produits en Russie et acheminés par la mer depuis Saint-Pétersbourg jusqu’en Guyane en 15 jours.
Un compte à rebours pour aller de l’avant : 55 minutes pour atteindre 694 kilomètres d’altitude et un peu plus de 27000 kilomètres/heure… Cela décoiffe !
- H0 - 17 s : allumage des deux premiers étages. Montée progressive en puissance par paliers et vérification du bon fonctionnement.
- H0 : décollage.
- H0 + 1 min 58 s : séparation des quatre boosters latéraux (premier étage).
- H0 + 3 min 29 s : largage de la coiffe (elle n’est plus utile : la fusée a quitté les couches denses de l’atmosphère).
- H0 + 4 min 47 s : séparation du deuxième étage.
- H0 + 8 min 47 s : séparation du troisième étage.
- H0 + 9 min 47 s : premier allumage de l’étage Fregat (pendant 219 secondes).
- H0 + 13 min 26 s : extinction Fregat et début de la phase balistique.
- H0 + 41 min 56 s : deuxième allumage de l’étage Fregat (249 secondes).
- H0 + 46 min 05 s : extinction Fregat.
- H0 + 54 min 55 s : séparation du satellite Pléiades 1B. Ce sont les équipes LEOP qui prennent le relais : le satellite devient autonome. Cette phase importante aura lieu en visbilité de la station de Perth en Australie
- H0 + 55 min : éjection des bouchons de champagne (ou au choix rhum ou vodka pour les heureux élus qui assistent au lancement sur place).
Ce n’est pas fini pour l'étage Fregat…
- H0 + 1 h 53 min 25 s : troisième allumage de l’étage Fregat (32 secondes).
- H0 + 2 h 28 min : rentrée contrôlée dans l’atmosphère de l’étage Fregat (une procédure sympathique qui limite les débris en orbite).
Profil de la mission VS04 pour la mise en orbite de Pléiades 1B.
La fusée Soyouz (ou Soyuz) en quelques chiffres
Ce n’est que le quatrième lancement depuis le CSG mais la fusée Soyouz a fait ses preuves : dérivée des lanceurs Vostok et Semiorka utilisés pour Gagarine et Spoutnik, elle compte près de 1800 lancements à son actif. La mise en service de la première version remonte à 1966, suivie par les versions modifiées Soyouz-L (pour lunaire), Soyouz-M, -U, -U2 et Soyouz-FG utilisée pour metre en orbite le vaisseau spatial Soyouz-TMA qui “fait la navette” (sans navette…) entre la Terre et la station spatiale international.
La version lancée en Guyane est la fusée Soyouz-ST, commercialisée par Starsem, une filiale commune entre Arianespace, Astrium, Roscomos (l’Agence Spatiale Russe), le Centre Spatial de Samara (TsSKB-Progress).
La fusée Soyouz-ST mesure 46,20 mètres de hauteur. Son diamètre à la base atteint 10,30 mètres et celui de la coiffe 4,11 mètres. La masse au lancement est de 308 tonnes dont 272 tonnes d’ergols (oxygène liquide et kérosène).
L’étage Fregat, dérivé des systèmes de propulsion des sondes spatiales Phobos et Mars 96, a des caractéristiques étonnantes : développé par la société russe Lavotchkine, il peut être rallumé jusqu’à vingt fois pour remplir des missions complexes avec plusieurs satellites à placer sur des orbites différentes. Il est très compact : sa masse est de 930 kilogrammes pour un diamètre de 3,35 mètres sur 1,5 mètres de hauteur.
En Guyane, les performances de Soyouz ST sont les suivantes :
- 3060 kilogrammes de charge utiles en orbite de transfert géostationnaire (GTO)
- 4900 kilogrammes en orbite base héliosynchrone (les 979 kilos de Pléiades 1B laissent de la marge !)
- 1570 kilogrammes en orbite moyenne (MEO).
Le dos de la petite tuyère :
Pour finir, amusez-vous à compter le nombre de tuyères sur la fusée Soyouz. Combien en voyez-vous ?
Si je compte bien :
- Sur chacun des quatre boosters du premier étage : 4 tuyères principales et 2 moteurs-verniers.
- Sur l'étage central : 4 tuyères principales et 4 moteurs-verniers.
- Sur le deuxième étage : 4 tuyères fixes et 4 moteurs-verniers.
- Sur l'étage Fregat : 1 tuyère principale et 12 moteurs à hydrazine pour le contrôle d'attitude.
Un dernière photographie spectaculaire pour ceux qui aiment les tuyères
En savoir plus :
- Un article sur les préparatifs du lancement du satellite Pléiades 1B du CNES.
- Un article sur le premier lancement de Soyouz au Centre Spatial Guyanais.
- Les autres articles du blog Un autre regard sur la Terre dans la catégorie « fusées et lancements »
- Un article sur le vol historique de Youri Gagarine en avril 1961.
- Une méthode originale pour mesurer l’altitude d’une fusée en bronzant.