Les incendies des sites pétroliers en Libye. Extrait d’une image acquise par l'instrument MSI
du satellite européen Sentinel-2 le 5 janvier 2016 à 9h40 UTC.
Crédit image : Copernicus / Commission Européenne / ESA
J’ai publié il y a quelques jours un article sur les incendies des sites pétroliers causés par une attaque de l’état islamique. Les images provenaient de l’instrument MODIS des satellites américains Aqua et Terra.
Le tout nouveau satellite européen Sentinel-2, qui vient de démarrer sa carrière opérationnelle, a également été témoin de ces incendies. Voici quelques extraits d’une image acquise le 5 janvier 2016. On note immédiatement l’apport des données à plus haute résolution : regardez par exemple la restitution des infrastructures portuaires ou des cuves de stockage d'hydrocarbures.
Haut en couleurs
Le satellite Sentinel-2 a terminé sa recette en vol en ovcembre 2015. Il a été lancé par une fusée Vega le 23 juin 2015 et les premières images ont été acquises dans les jours suivants. Sentinel-2 est un satellite d'observation optique : son instrument MSI (Multispectral Imager) fournit des images dans 13 bandes spectracles, avec un pas d'échantillonnage au sol de 10 à 60 mètres selon les bandes. Les produits Sentinel-2 sont disponibles sur le portail "Sentinel Data Hub" depuis la fin du mois de novembre 2015.
Les incendies des sites pétroliers en Libye. Deux extraits, un en champ large et un plus serré, de l’image acquise par le satellite européen Sentinel-2 le 5 janvier 2016. Crédit image : Copernicus / Commission Européenne / ESA
Bizarrement, l’image a été publiée sur les pages Earth Observatory du site de la NASA. La distribution des images des satellites Sentinel se fait selon une politique « accès libre, illimité et gratuit » définie par la Commission Européenne pour les satellites du programme Copernicus.
Donc, rien n’empêche la NASA ou n’importe quelle autre organisation d’exploiter les images des satellites Sentinel.
Ce qui est plus étonnant, c’est que ni l’Agence Spatiale Européenne (ESA) ni la Commission européenne n’aient publié cette image sur leur site Internet ou auprès des médias.
En Europe, certaines personnes ont émis quelques réserves sur la politique de distribution des données Sentinel de Copernicus : y a-t-il un risque que les grands acteurs du web comme Google, Microsoft ou Facebook, avec leur force de frappe, mettent en place des services utilisant les données Sentinel qui "empêchent" les fournisseurs de services européens d’exploiter cette nouvelle source de données. La forme ultime du modèle économique du passager clandestin ("free-rider"), qui exploite un infrastructure sans participer à son financement ?
Big brother ou big data
L’exemple présenté ici est anecdotique mais il pose une vraie question, également soulevée à Bruxelles pendant la conférence EU Space Strategy 2016 : il y a un réel enjeu de développer rapidement les usages européens des données Sentinel, sur les marchés institutionnels ou commerciaux, et cela passe par des mécanismes performants d’accès à ces données.
Cela montre aussi tout l’intérêt des actions destinées à promouvoir l’usage des images satellites pour les applications opérationnelles.
Les initiatives éducatives et grand public en font partie. De ce point de vue, un outil similaire à MIRAVI, développé à l'époque par l'ESA pour faire connaître les images MERIS du satellite Envisat, serait très utile.
En savoir plus :
- Un autre article du blog Un autre regard sur la Terre sur les incendies en Libye.
- Les articles dans la catégorie « images d’actualité, images du jour ».
- Les articles dans la catégorie « sécurité et défense ».
- D’autres articles sur les missions Sentinel du programme Copernicus.