Les dégâts de la tornade de Moore vus par le satellite Pléiades-1B. Image acquise le 22 mai 2013
à 17h46 UTC. La version présentée ici est en résolution réduite.
Copyright 2013 CNES – Distribution Astrium Services / Spot Image
La première évaluation donnait « au moins une catégorie EF4 ». La tempête qui a frappé la ville de Moore dans l’Oklahoma le 20 mai 2013 en fin de journée a finalement été classée par le National Weather Service au niveau EF5, le plus élevé sur l’échelle de Fujita Améliorée (EF signifie « Enhanced Fujita »), en vigueur depuis 2007 aux Etats-Unis. En clair, des vitesses de vents supérieures à 320 km/h. Rien n’y résiste… L’article publié dès le 21 mai sur le blog Un autre regard sur la Terre montrait les super-cellules orageuses quelques minutes avant le déclenchement de la tornade.
Les images vues du sol ou d’avion qui tournent en boucle depuis mardi sur les chaînes d’information montrent effectivement un bilan effrayant. Les premières images satellite à très haute résolution le confirment en donnant une vision d’ensemble encore plus impressionnante. C’est le cas de l’image illustrant cet article acquise le 22 mai 2013 à 17h46 UTC et publiée par Astrium Services : tout au long de la trajectoire de la tornade, matérialisée par une trace rougeâtre, tout est anéanti, réduit en miettes, écrasé par une main géante. Les bâtiments, les maisons, les arbres, les voitures : tout a été balayé.
Les dégâts vus de l’espace, à 694 kilomètres d’altitude
Les images suivantes sont trois extraits de l’image d’origine. Elles sont présentées ici en résolution légèrement réduite pour couvrir des zones assez larges. Chaque pixel de l’image d’origine transmise par les satellites Pléiades, une fois traitée au sol, représente un carré de 50 centimètres de côté (très exactement quand l’image est prise à la verticale).
Trois extraits de l’image Pléiades-1B montrant les dégâts de la tornade le long de sa trajectoire dans la
ville de Moore. Copyright 2013 CNES – Distribution Astrium Services / Spot Image
Attention, fragile…
Personnellement, ces images m’impressionnent beaucoup. A titre professionnel, j’ai vu de nombreuses images de catastrophes naturelles : cyclones, incendies, inondations, tremblement de terre. Je crois que ce sont les images des dégâts des tornades qui représentent à mon avis le mieux la notion d’aléa et de risque, avec des dégâts sur des zones souvent relativement étroites (comparées par exemple aux zones touchées par les cyclones). La marque qu’elles laissent, comparable à un coup de cutter géant, surprend toujours. Elle illustre la vulnérabilité de l’être humain face aux forces de la nature. Vous trouverez d’autres exemples sur le blog Un autre regard sur la Terre avec le tornades de Joplin ou de Tuscalosa. On comprend le soulagement de ceux qui étaient à quelques mètres du couloir dévasté et on plaint les victimes qui ont tout perdu en quelques minutes...
Pourquoi pas d’images avant le 22 mai ?
Tout simplement parce que la couverture nuageuse ne le permettait pas. C’est un des freins à l’imagerie rapide utilisée en cas de catastrophe naturelle pour faciliter l’action des secours et de la protection civile, les fameux « first responders » en anglais. En dehors de cette contrainte météo, la constellation de deux satellites Pléiades (complétée par Spot 6 et bientôt Spot 7), grâce à l’agilité de leur plate-forme et aux possibilités de programmation du satellite (trois fois par jour), permet d’obtenir des images avec des délais très courts.
Une consultation du catalogue (en ligne ici) d'Astrium Services permet de constater que des acquisitions ont été programmées dès le 21 mai avec Pléiades et Spot 6 mais les nuages n'ont pas permis d'obtenir d'images de qualité suffisante.
Copie d'écran du catalogue en ligne des images Pléiades et Spot (Geostore).
Crédit image : Astrium GEO-Information Services
Très intéressant : Astrium Services publie également une image d’archive très récente acquise également par l’un des deux satellites Pléiades le 29 avril 2013, il y a moins d’un moins et qui donne une image de référence de la situation avant la catastrophe.
La ville de Moore aux Etats-Unis vue par le satellite Pléiades avant et après le passage de la tornade.
L'image d'achive a été acquise le 29 avril 2013. La version présentée ici est en résolution réduite.
Copyright 2013 CNES – Distribution Astrium Services / Spot Image
Un conseil : ouvrez l’image du 29 avril et celle du 23 mai dans deux fenêtres et passez de l’une à l’autre avec les touches Alt + Tab…
L’apport du spatial juste après une catastrophe : la cartographie rapide
Il y a ici tous les ingrédients pour faciliter le travail de cartographie rapide, réalisé en quelques heures par des équipes de spécialistes comme celle du SERTIT à l’Université de Strasbourg ou celle d’Astrium GEO-Information Services pour les activités de détection de changement. Plusieurs articles du blog Un autre regard sur la Terre y ont déjà été consacrés à cette technique particulière dans la catégorie « satellites et gestion de crise », comme par exemple cet article sur le service GMES SAFER mis en œuvre de 2009 à 2011.
Notez qu’il est assez rare de disposer d’une bonne image d’archive à une date aussi rapprochée de la catastrophe. J’ignore pour quelle raison cette image du 29 avril avait été acquise mais je vais me renseigner… S’agit-il d’une acquisition de « précaution » dans une zone, au cœur de la Tornado Alley, qui a déjà été touchée à plusieurs reprises par des tornades ou d’une demande d’acquisition qui n’a rien à voir ?
En savoir plus :
- Sur le blog Un autre regard sur la Terre, un autre article sur la tornade du 20 mai 2013 à Moore dans l’Oklahoma.
- Les autres articles dans la catégorie « satellites et catastrophes naturelles ».
- Le site d’Astrium GEO-Information Services, la galerie d’images Pléiades et la page sur le service de surveillance de sites "Go Monitor".
- Le site du SERTIT (Université de Strasbourg) et la page sur les actions de cartographie rapide.
- Le site Tomrod avec une initiative de cartographie collaborative à partir d'images satellites : "Help Map Damage of the Devastating Moore Tornado".
- Sur le site d’Astrium GEO-Information Services, une autre image du satellite Pléiades 1A en mars 2012 montrant les dégâts de la tornade d'Harrisburg (Illinois). La tornade a frappé la ville le 29 février 2012.
Suggestions d’utilisations pédagogiques en classe :
- En utilisant l’image acquise juste après le passage de la tornade (le 23 mai 2013), faire un zonage des zones affectées par la tornade.
- Evaluer l’apport de l’image de référence du 29 avril pour faciliter l’évaluation des dégâts.
- On peut le faire en passant rapidement d’une image à l’autre lorsqu’elles sont affichées sur un vidéo projecteur ou avec des versions imprimées (si vous avez une imprimante couleur qui le permet, le format A3 est plus facilement exploitable par les élèves).