Il y a des régions qui sont plus difficiles que d'autres à observer par un satellite optique. C'est le cas de la Norvège et de l'Europe du nord où la couverture nuageuse complique la tâche des équipes en charge de la programmation des satellites.
Quand la météo est favorable, on obtient de belles images de grandes surfaces enneigées avec un traît de côte que se découpe très nettement.
C'est le cas ici avec une très belle image provenant du capteur MERIS du satellite Européen ENVISAT, prise le 23 février 2011.
Extrait d'une scène acquise par le satellite Envisat le 23 février 2011 à 9h46 UTC. Un traitement
de correction de dynmaique a été appliqué par Planète Sciences Midi-Pyrénées. La résolution est
réduite d'un rapport 3 environ par rapport à la résolution d'origine.
Crédit image : Agence Spatiale Européenne (ESA)
Cette image, présentée ici en résolution réduite, couvre une partie de la Norvège, la Suède et la Finlande. Au sud, la zone sans neige correspond au nord de l'Allemagne et de la Pologne avec l'embouchure de l'Oder. On voit également en partie la Lituanie, la Lettonie et l'Estonie.
Au nord, l'image va au-delà du cercle polaire : la partie supérieure de cet extrait correspond à la latitude 69°N.
Le ciel n'est pas complètement dégagé mais on distingue nettement le trait de côte, la mer baltique et le golfe de Botnie, partiellement couvert de glace. On peut également identifier les lac Vänern et Vattern et, en mer Baltique, les îles d'Öland et de Gotland, au sud de la ville de Stockholm.
L'image ci-dessous est un extrait centré sur la partie nord-ouest de la côte de Norvège, bien dégagée, au nord du cercle polaire, au niveau des îles Lofoten et Versteralen. Dans cette région, un peu plus à l'est, au nord de la Suède, les monts Sarck et Kebnekaise ont une altitude d'environ 2100 mètres.
En cherchant bien, on peut localiser, en utilisant le relief et les cours d'eau, Kiruna en Suède. Tromsoe (en norvège), qui n'apparaît pas sur l'image est juste au nord. A proximité de Kiruna est installée une station de réception dite polaire, particulièrement bien placée pour recevoir les images des satellites d'observation en orbite polaire.
Extrait d'une scène acquise par le satellite Envisat le 23 février 2011 à 9h46 UTC. Zoom sur la
partie nord de la côte de Norvège au dessus du cercle polaire. Un traitement de correction de
dynmaique a été appliqué par Planète Sciences Midi-Pyrénées. La résolution est d'environ
250 mètres. Crédit image : Agence Spatiale Européenne (ESA)
Les stations de réception : un élément clé de la performance des systèmes satellite
Une fois les images acquises par les satellites d’observation, il faut les transmettre à leurs utilisateurs sur Terre. La première étape passe par les stations de réception des images, équipées de grandes antennes capables de recevoir la télémesure envoyée par les satellites. En fonction des caractéristiques de l’antenne et de ses performances en suivi, une station peut « voir » le satellite défiler dans le ciel dans un certain « cercle de visibilité ».
Il y a deux possibilités d’acquisition et de transmission des images, soit l’acquisition et la transmission directe des images lorsque le satellite se trouve dans la zone de visibilité d’une antenne, soit l’acquisition puis la transmission différée pour les satellites possédant une mémoire ou un enregistreur de bord. La performance globale d’un système de satellites dépend donc non seulement du ou des satellites en orbite mais aussi du nombre et de la position sur la Terre des stations de réception.
Les stations polaires : une position stratégique pour les satellites héliosynchrones
Il existe des positions privilégiées pour être souvent en visibilité des satellites d’observation. Ceux en orbite basse ont des orbites polaires ou quasi-polaires, souvent héliosynchrone (ils passent régulièrement au-dessus d’une zone donnée à la même heure locale). Cela signifie qu’à chaque orbite (par exemple toutes les 101 minutes pour Spot 5 sur son orbite, inclinée à 98,7° à 822 km d’altitude), le satellite passe à proximité du pôle nord et du pôle sud. Ce n’est pas le cas pour une station à l’équateur.
C’est assez facile de s’en rendre compte avec un globe terrestre en simulant le mouvement d’un satellite. Par exemple, la station de Kiruna voit entre 10 et 12 des 14 passages quotidiens du satellite Envisat. On comprend donc pourquoi tous les opérateurs de satellites cherchent à avoir au moins une station polaire qui verra passer le satellite plusieurs fois par jour. C’est un atout important pour toutes les applications qui demandent une grande réactivité : surveillance maritime, support à la gestion des catastrophes naturelles, défense et sécurité. Soit la zone d’intérêt est dans le périmètre de réception directe d’une station sol, soit on enregistre l’image dans la mémoire de bord puis on la « décharge » au-dessus de la station polaire.
Cercles de visibilité d'un réseau de stations de réception satellites. Le "cercle" rouge correspond à
la station principale Spot à Toulouse. La courbe rouge au nord donne la zone de visibilité de la
station de Kiruna. Crédit image : Astrium GEo-Information Services
Par exemple, pour disposer rapidement d’une image acquise sur la Ville d’Abidjan en Côte d’Ivoire ou au large des côtes de Somalie, respectivement à environ 4300 km à 6400 km de Toulouse, donc en dehors du cercle de réception de la station de la rue des satellites, la station polaire de Kiruna est bien adaptée puisqu’elle voir passer le satellite environ 60 à 75 minutes après l’acquisition des images.
Pour les satellites Spot opérés par Astrium GEO-Information Services, les deux stations principales sont donc Toulouse en France et Kiruna en Suède. D’autres stations de réception directe (SRD) situées dans le monde entier ont signé des accords avec la société Astrium GEO-Information Services pour recevoir directement les données Spot dans leur zone de visibilité.
Kiruna est également une station polaire importante pour les satellites de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) comme ENVISAT, ERS-2, GOCE, Cryosat. C’est également le cas pour le satellite radar TerraSAR-X avec deux autres stations terrestres (Inuvik au Canada et O’Higgins en Antarctique). Kiruna sera également utilisée pour la réception des images des satellites Pléiades.
La station de Kiruna en Suède avec deux antennes de poursuite des satellites à défilement.
Crédit image : Agence Spatiale Européenne (ESA)
Sur le site MIRAVI de l’ESA, en consultant les données auxiliaires (voir le lien « détails ») sous l’image de l’image présentée dans cet article, on constate que l’image a été reçue et traitée par la station dite « PDHS-K ». C’est le code de la station de Kiruna, située dans la zone couverte par l’image.
Toutes les opérations de routine de la station sol de Kiruna sont automatisées et contrôlées à distance par le centre de contrôle ESTRACK (ECC) de l’ESA/ESOC à Darmstadt en Allemagne. Les opérations locales et la maintenance sont assurées par la socité Swedish Space Corporation (SSC).
A Kiruna, l'antenne de poursuite KIR-2 de 13 mètres de diamètre équipée pour la transmission des télécommandes et la réception des données images en bande X (8 GHz).
Crédit image : Agence Spatiale Européenne (ESA).
Pour être complet, les données image peuvent parfois être retransmises par liaison radio ou optique laser vers un satellite relais placé sur une orbite géostationnaire à 35800 km d’altitude. Cette option qui a déjà été mise en œuvre sur Spot avec le système PASTEL (PAssager Spot de Télécommunication Laser) ou ENVISAT avec le satellite Artemis (Advanced Relay Technology Mission) est une alternative ou une solution complémentaire à un réseau de stations sol.
En savoir plus :
- Sur le site de Spot Image, une page sur l’installation du terminal de réception Pléiades à Kiruna en mars 2010.
- Sur le site de l’ESA, une page sur la station de Kiruna et la page sur le centre européen d’opérations spatiales (ESOC, European Space Operations Centre).
- Le site Miravi de l'ESA pour retrouver les images MERIS et ASAR du satellite européen Envisat.
Suggestions d'utilisations pédagogiques en classe :
- Les images satellites en support aux cours de géographie. Dans différentes régions du monde, en utilisant les images publiées sur le blog Un autre regard sur la Terre, travail intéractif avec les élèves pour découvrir les pays, comparer les images aux cartes et se poser des questions sur ce qu'on voit sur les images satellites.
- Travail sur l'ensemble de la chaîne d'acquistion des images, depuis la demande d'image, jusqu'à la livraison des informations extraites des images. Jeu de rôle en mettant l'accent sur la programmation et l'utilisation du réseau de stations de réception pour différentes situations : catastrophe naturelle, cartographie systématique d'une région.