"Weather remains at a 30 percent chance of favorable weather for liftoff at 11:26 a.m. Teams are not working any issues that would delay the launch". Le dernier point fait par la NASA ce matin...
Vendredi 8 juillet, à 17h26 (heure française, soit 11h26 en Floride), si la météo le permet, le lancement d’Atlantis pour la mission STS-135, le 135ème vol d’une navette spatiale américaine, marquera la fin d’une aventure de 30 ans amorcée le 12 avril 1981 avec la première mise en orbite de Columbia, exactement 20 ans après le premier vol de Youri Gagarine. Les premières études ont démarré à la fin des années soixante.
"Tribute to Atlantis" publié par la NASA sur son site. Pour ceux qui préfère les belles images de la navette au décollage ou dans l'espace, voir à la fin de cet article une toute petite sélection d'images de la NASA. Crédit image : NASA
Les spectaculaires images des décollages du space shuttle ou de ses manœuvres en orbite autour de l’ISS ou du télescope Hubble ont certainement incité les jeunes de ma génération à travailler dans le spatial ou même à rêver de devenir astronaute. C’est avec un pincement au cœur qu’ils assisteront demain à ce dernier lancement.
L’image suivante est une image de l’aire de lancement 39A du Centre Spatial Kennedy en Floride. Elle a été prise par le satellite GeoEye-1 le 1er mai 2011, quelques jours avant que la navette Endeavour ne s’envole pour sa dernière mission (STS-134) vers la Station Spatiale Internationale.
Image du pas de tir 39A au Kennedy Space Center acquise le 1er mai 2011 par le satellite GeoEye-1.
La résolution de l’image d’origine est de 50 centimètres. Celle de la version publiée ici est réduite
d’un rapport 2 environ. L'extrait centré sur la navette est en pleine réoslution. Crédit image GeoEye.
La navette, un fil d’Ariane pour la coopération spatiale entre les Etats-Unis et l’Europe.
C’est insuffisamment connu du public et la société Astrium le rappelle dans un récent communiqué de presse : l’aventure de la navette spatiale est étroitement liée à l’activité spatiale en Europe, à travers des coopérations entre la NASA et les agences nationales ou l’ESA.
Saviez-vous par exemple que les moteurs principaux de la navette (SSME pour Space Shuttle Main Engine) ont été mis au point à partir d’un brevet d’invention déposé au milieu des années 60 et issu d’une collaboration entre les sociétés MBB (aujourd’hui Astrium à Ottobrunn en Allemagne) et Rocketdyne / North American Aviation ? En 1966, une proposition commune est remise à l’US Air Force pour concevoir des chambres de combustion à très haute pression (composées de cuivre à canaux de refroidissement fraisés). La combinaison de propergols retenue est un mélange d’hydrogène et d’oxygène liquides. MBB conçoit et fabrique le moteur de démonstration selon l’un de ses brevets internes (USP 3 595 025). A l’époque, seul Rocketdyne dispose des bancs d’essais nécessaires : les tests sont donc menés dans son centre d’essais de Santa Susanna, en Californie. Le programme de recherche germano-américain sur les hautes pressions porte alors le nom de BORD 1 (BOelkow/Rocketdyne Division). Les résultats sont très positifs, avec une pression de combustion de 283 bar, un record mondial toujours inégalé pour la combinaison d’ergols hydrogène / oxygène. Ce succès amène la NASA à confier à Rocketdyne le contrat de développement du moteur cryogénique principal de la navette spatiale, avec des droits d’exploitation pour le brevet. La solution retenue est constituée d’un orbiteur, un réservoir extérieur et deux propulseurs d’appoint. Elle est officiellement validée par la NASA le 15 mars 1972. Les travaux de construction débutent cinq mois plus tard.
Essai d'un moteur SSME (space Shuttle Main Engine) de la navette spatiale au Stennis Space Center
en mai 1981. Crédit image : NASA.
Beaucoup d’autres collaborations suivront et se concrétiseront par des charges utiles embarquées dans la soute de la navette spatiale :
- En juin 1983, le vol STS-7 de Challenger, emporte la palette d’expérimentation scientifique SPAS (Shuttle PAllet Satellite), développée et fabriquée par Astrium. Suivie en 1993 et 1997 (vols STS-51, STS-66, STS-80, STS-85) des les instruments Orfeus (spectromètre à ultraviolets) et Crista (télescope infrarouge cryogénique pour l’étude de l’atmosphère).
- En novembre 1983, Columbia emporte pour la première fois le laboratoire spatial Spacelab. Ce laboratoire effectuera au total 21 vols jusqu’en avril 1998, également à bord de Columbia (STS-90).
- De nombreux équipements européens (centrifugeuses, fours, serres, congélateurs et manipulateurs) ont ainsi contribué à la recherche en conditions d’apesanteur.
- Dans le domaine de l’étude de l’univers, le télescope spatial Hubble (avril 1990) embarque la caméra pour objets faiblement lumineux FOC (Faint Object Camera), également conçue par Astrium. Etonnant : elle est ramenée sur Terre à la fin du vol STS-109 de mars 2002 et est aujourd’hui exposée au musée Dornier, près de Friedrichshafen (Allemagne).
- Au cours de l’été 1992, Atlantis met en orbite la plate-forme automatique européenne EURECA, avec des expériences en apesanteur.
Observation de la Terre et SRTM : un signal radar qui fait l’aller-retour sur la navette qui fait l’aller-retour.
La navette Endeavour a effectué trois missions d’observation de la Terre en 1994 et 2000. Embarqué dans sa soute ou sur le bras manipulateur, un radar en bande X, « ancêtre » de TerraSAR-X, a participé à la mission SRTM (Shuttle Radar Topography Mission). STRM est une cooperation entre la NASA, la NGA (National Geospatial Intelligence Agency) et les agences spatiales allemandes (DLR) et italiennes (ASI).
Exemple de produit dérivé des données SRTM. Le relief du sud de la Floride avec le centre spatial
Kennedy visible sur l'extrait en pleine résolution. Crédit image : NASA/JPL/NGA
Sur cet exemple de produit SRTM, la faible altitude du sud de la Floride est bien visible. A gauche, une représentation en couleurs de l’altitude (vert pour les zones les plus basses et blanc pour les hauteurs maximales soit environ 60 mètres sur cet exemple). A droite l’échelle de couleur met l’accent sur les altitudes inférieures à 5 mètres (en bleu) et montre la vulnérabilité de la région aux inondations côtières (surcote). Les données ont été acquises en février 2000 par la navette Endeavour. Le centre spatial Kennedy, avec la piste d’atterrissage de la navette, et Cap Canaveral sont visible en haut à droite de l’image. En dessous de la vue d’ensemble, l’extrait en pleine résolution est centré sur le KSC (Kennedy Space Centre). Voici également un lien permettant de se repérer sur Google Maps.
En Europe, l'héritage de STRM, en 2011, ce sont les satellites TerraSAR-X et TanDEM-X.
En Bolivie, à partir de données TanDEM-X, un modèle numérique d'élévation de la région du volcan
Tunupa et du plus grand lac salé du monde, le Salar de Uyuni. Les altitudes les plus basses sont
représentées ici en bleu foncé. Crédit image : DLR
Christophe Colomb, Johannes Kepler et Jules Verne : des personnages célèbres pour passer à l'ATV
Le 11 février 2008, Atlantis (vol STS-122) arrime le laboratoire spatial européen « Columbus », successeur de Spacelab, à la Station spatiale internationale (ISS). La même année, l’ATV, le premier cargo automatique, ravitaille l’ISS. Il peut emporter jusqu’à 7,5 tonnes de charge utile en orbite basse, afin d’acheminer de l’eau, de l’oxygène, des vivres, des vêtements, du carburant et autres objets personnels à bord de la station spatiale. Il réajuste également l’orbite de l’ISS au moyen de ses propulseurs.
Shut off the shuttle : so use soyouz…
4 jours après l’independance day, les Etats-Unis vont, au moins temporairement, dépendre des fusées russes pour acheminer astronautes, vivres et fret vers la station spatiale internationale dont la durée de vie va été prolongée jusqu’en 2020.
Deux dramatiques accidents ont marqué la carrière de la navette, en 1986 avec l’explosion de Challenger un peu plus d’une minute après le décollage et en 2003 lors du retour sur terre de Columbia. Mais le véritable échec du concept de navette spatiale réutilisable est de ne pas être parvenu à réduire les coûts du transport spatial et à en faciliter la commercialisation, ce qui était l’objectif affiché au démarrage du programme : un moyen de transport orbital réutilisable moins cher que les fusées classiques à usage unique. Le coût global est estimé à 209 milliards de dollars.
Au total, 848 passagers ont eu la change de voyager à bord du space shuttle, soit 355 astronautes de 16 nationalités. 14 ont perdu la vie au cours des deux accidents.
Le dernier équipage n'est composé que de 4 astronautes (au lieu de 7 habituellement) : en cas de problème sur la navette, pour le voyage de retour, il devront utiliser les véhicules Soyouz. La priorité a été donnée au fret et à l'approvisionnement de la station spatiale internationale.
Quelques belles images de la navette au décollage, dans l'espace ou au retour sur Terre
Et la photo du jour...
Image du jour sur le site de la NASA : le 7 juillet,la navette Atlantis sur l'aire de lancement 39 A.
La tour de service est retirée. Les reflets dans les flaques d'eau de pluie rappellent que la météo
sur le site peut retarder le départ de la dernière navette. Crédit image : NASA / Bill Ingalls
En savoir plus :
- Sur le site de la NASA, les pages, (en anglais), sur le space shuttle et les galeries de photographies sur la navette Atlantis. Une page interactive très complète sur l'aventure des navettes spatiales et les plus belles images de la NASA sur le space shuttle.
- Une galerie de produits SRTM, avec une description détaillée (en anglais) sur le site du JPL.
- Sur le site du DLR (Agence Spatiale Allemande), la page (en anglais) sur les produits SRTM en bande X.
- Sur le site d'Astrium GEO-Information Services en Allemagne (Infoterra GmbH), la galerie d'images TerraSAR-X et TanDEM-X.
- Quelques articles du blog Un autre regard sur la Terre où il est question de navette spatiale et de l’ISS :
- La navette ne va plus faire la navette : 50 ans après Gagarine, pour revenir sur terre, le parachute, comme au bon vieux temps !
- Circulation chargée sur la route vers la station en février 2011 : après l’ATV-2 Johannes Kepler, la navette Discovery rejoint l’ISS
- Lancement de l'ATV Johannes Kepler par la 200ème fusée Ariane : deux photos prises à partir de l'ISS par l'astronaute Paolo Nespoli
- La réponse au quiz d’avril 2011 : à Baïkonour, la fusée lunaire russe N1 vue par le satellite espion américain KH-4B Corona en septembre 1968
- La solution du quiz de novembre 2010 : l'île de Pâques observée par le satellite TerraSAR-X
- Les autres articles du blog Un autre regard sur la Terre dans la catégorie rétroviseur.